L’homme et la mer

Il a tout quitté, sans un adieu,
Un port, des murs, des jours trop vieux.
Il a largué les poids du monde,
Pour un souffle brut, une errance profonde.

Seul sur son bateau, frêle et fier,
Il fend l’écume, il brave l’air.
Plus d’horaires, plus d’entraves,
Juste le vent qui danse et grave.

La mer s’étire, vaste, infinie,
Un refuge mouvant, un abri.
Ici, nul besoin d’adresse ou de clé,
Son toit, sa route, tout peut voguer.

Les vagues bercent ses pensées libres,
Chaque aurore l’étonne, le délivre.
Un monde sans limites sous un ciel ouvert,
Où chaque horizon est un univers.

Il parle aux étoiles, aux vents indociles,
Aux silences profonds, aux forces subtiles.
Son âme s’ancre dans l’instant,
Un homme, un bateau, le vivant battant.

Et s’il devait un jour accoster,
Si le rivage osait l’appeler,
Il rirait, léger, insaisissable,
Car il est devenu l’eau, insubmersible.

Les jours s’étirent sans compter,
Le temps n’existe plus, évaporé.
Chaque aube est une promesse nue,
Chaque nuit, une danse inconnue.

Les vents l’emportent, guides muets,
Vers des rivages qu’il n’a jamais souhaités.
Mais qu’importe, il n’a plus d’attaches,
Son sillage est son seul héritage.

Parfois, il croise un autre navire,
Un reflet d’errance, un écho à saisir.
Les regards se croisent, un instant suspendu,
Puis chacun poursuit, solitaire et résolu.

Il apprend à lire les murmures de l’eau,
À deviner les humeurs du flot.
Chaque vague est une voix ancienne,
Un secret porté par l’âme marine souveraine.

Son bateau craque, mais il le berce,
Comme on rassure un corps qui tangue.
Il n’a plus de maison, plus de frontière,
Mais il habite l’infini de la mer.

Et s’il devait, un soir, s’endormir,
Que l’océan le prenne sans prévenir,
Il sourirait, le cœur apaisé,
Car tout quitter, c’était renaître entier.

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